Ancien capitaine des Grenadiers, Ernso Laurence a décidé de se présenter aux prochaines élections à la tête de la fédération. Un poste occupé depuis vingt ans par Yves Jean-Bart, alias Dadou, qui dirige le foot haïtien avec l’aide de son fils, Yves Robert, alias Papito.
Après un imbroglio administratif, des menaces & autres campagne de presse diffamantes contre les possibles opposants, Dadou sera vraisemblablement le seul candidat à sa réélection. Comme d’habitude, mais Laurence ne baisse pas les bras et poursuit son combat, dans l’espoir d’un meilleur lendemain.
1 – Pourquoi as-tu décidé de te présenter aux élections ?
En tant qu’ancien capitaine de la sélection nationale de football, ça fait longtemps que je suis de près tout ce qui se passe dans notre sport roi. Il y a tellement de dérives dans la gestion de notre football… Je crois qu’il est important d’apporter un souffle nouveau, notamment pour les jeunes qui pratiquent ce jeu. Ces jeunes qui sont très mal utilisés et même exploités par les responsables.
Dans d’autres pays, les fédérations vivent des clubs. En Haïti, c’est l’inverse
Je veux devenir président de la FHF (fédération haïtienne de football) pour aider les clubs à sortir de l’assistanat dans lequel la FHF les met depuis toujours. Dans d’autres pays, les fédérations vivent des clubs. En Haïti, c’est l’inverse. On doit changer la donne en aidant les clubs à se structurer afin qu’ils puissent se prendre en charge eux-mêmes.
Enfin, je me porte candidat pour que cesse une fois pour toutes les gabegies administratives qui gangrènent notre football depuis l’avènement de l’actuel comité exécutif.
2 – Tu as été transparent lors de tes interventions, revenant même sur ton changement d’age et d’identité. Comment l’as-tu vécu à l’époque ? Ça doit quand même laisser des traces au niveau personnel, psychologique, familial..
Effectivement, cela s’est passé en 1991, j’avais alors 17 ans. La sélection nationale devait disputer les éliminatoires de la Coupe du Monde 1994. Par rapport à mon talent, les dirigeants de l’époque voulaient à tout prix que je fasse partie du groupe, mais mon âge ne correspondait pas. Ils ont alors initié les démarches qui ont abouti à un changement d’identité. Je suis passé de Hérode Noël à Ernso Laurence et j’ai pu finalement effectuer le voyage avec l’équipe. J’ai été deux ans plus tard sanctionné par la fédération pour une durée d’un an.
Je prends solennellement l’engagement, une fois président de la Fédération Haïtienne de Football, de prendre toutes les dispositions pour éliminer une telle pratique (trafic d’âge et identité)
Après, je suis revenu encore plus fort jusqu’à devenir capitaine de la sélection nationale pendant près de sept ans. J’ai par la suite entamé les démarches judiciaires pour obtenir un jugement légal qui me permet d’évoluer définitivement sous le nom d’Ernso Laurence. Je dois vous dire que cela n’a pas été trop facile à digérer mais au fil du temps, je me suis résigné à vivre avec. C’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles je veux prendre les rênes de la FHF pour éradiquer définitivement ce fléau qui ronge le foot haïtien.
3 – Cette pratique est répandue dans divers pays/fédérations (République Démocratique du Congo, Cameroun, Irak, etc.). Est-ce aussi régulier à Haïti ?
Comme je l’ai précisé dans ma dernière réponse, je considère ce phénomène comme un fléau. Oui, malheureusement, de nombreux jeunes sont encore victimes de cette pratique malsaine chez nous en Haïti.
Cela doit cesser. Je prends solennellement l’engagement, une fois président de la Fédération Haïtienne de Football, de prendre toutes les dispositions avec mon équipe pour éliminer une telle pratique.
4 – Quelles seraient les premières choses que tu ferais à la tête de la fédération haïtienne ? Quels sont les chantiers les plus importants ?
Ce sera d’abord au niveau administratif. Il est urgent de changer le mode de fonctionnement de l’administration du bureau fédéral où le népotisme règne en maître actuellement. A titre d’exemple, le fils du président fait office de gérant des sélections nationales, une véritable aberration. Les statuts de la FHF disent clairement que c’est l’un des vice-présidents du comité exécutif qui doit occuper une telle fonction. Il est également responsable de marketing au sein du bureau fédéral… Mais sans gêne, les membres du comité cautionnement une telle chose.
Nous devrons repenser l’administration de la FHF. Parmi les chantiers les plus importants, on mettra l’accent sur la restructuration des équipes de football qui sont le moteur de la fédération. Plus les clubs sont forts, plus la fédération sera forte. On tâchera également de relancer le football jeune en implantant des compétitions juvéniles sur tout le territoire.
5 – Parfois, les résultats de la sélection nationale d’un pays cache la misère du football local. Pour toi, est-ce le cas à Haïti ? Quelle serait ta politique pour contribuer concrètement à l’essor du football local ?
Effectivement, c’est le cas en Haïti. Permettez quand même que je salue les performances de nos sélections nationales ces derniers temps, notamment l’excellente année 2019 : les moins de 17 ans ont joué la Coupe du Monde, et le onze national masculin a atteint la demi-finale de la Gold Cup. Félicitations !
Les résultats des Grenadiers ne sont que l’arbre qui cache la forêt
Cependant, les résultats des Grenadiers ne sont que l’arbre qui cache la forêt. Le niveau de nos championnats locaux laisse à désirer et ne reflète en rien les résultats de l’équipe senior sur le plan international. C’est pourquoi nous miserons sur le renforcement des clubs qui seront plus forts et plus compétitifs, ce qui relancera nos compétitions nationales.
6 – Dans ces temps difficiles pour le pays, j’imagine aussi que tu souhaites donner à travers le sport un espoir et peut-être une voie pour la jeunesse ?
Dans les pays difficiles comme le nôtre, le sport en général et particulièrement le football, qui est d’ailleurs le sport roi, est l’un des moyens pouvant permettre aux jeunes de changer leur statut et par la même occasion projeter de meilleures images du pays à l’extérieur.
Sous mon administration, on fera en sorte que les jeunes reprennent confiance en eux. Les jeunes footballeurs haïtiens doivent avoir les mêmes chances que ceux évoluant à l’étranger. Le joueur haïtien qui se sacrifie régulièrement à l’entraînement doit être au final récompensé de ses efforts. Oui, le Cartel L’Espoir que je dirige a un plan de développement durable pour le football haïtien pour les huit années à venir.
Les jeunes dit-on, sont l’avenir du pays. A travers le football, ils doivent pouvoir construire leur avenir sans la moindre crainte.
NB : d’autres dossiers autour du football haïtien seront bientôt publiés sachant que le président de la FHF a demandé un droit de réponse suite à ma vidéo. La suite au prochain épisode…
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